Une demande spéciale à la rangée de framboises

Alors que je crée le guide «Partager notre nature», destiné à aider les personnes voulant créer leur propre grainothèque dans l'est du Canada, je remarque que de nombreux mouvements se chevauchent et convergent vers une plus grande appréciation de nos plantes indigènes. On commence à reconnaître à quel point elles nourrissent notre faune et notre flore, mais aussi à quel point elles nous permettent de mener notre vie ici. À ce sujet, il existe des principes que nous devrions tous suivre et qui étaient bien connus de nos ancêtres, quelle que soit notre origine. Ils ont été bien présentés par Robin Wall Kimmerer à la page 180 de son livre Braiding Sweetgrass.

Article passés basés sur ces principes :

  1. Apprenez à connaître les manières de celleux qui prennent soin de vous, afin que vous puissiez prendre soin d'elleux.

  2. Présentez-vous. Soyez responsable en tant que personne qui demande la vie.

Troisième principe de la Récolte honorable : Demandez la permission avant de prendre. Respectez la réponse.

Je ne sais pas si c’est parce que nous les avons taillées lorsqu’elles n’avaient encore pas de feuilles, mais on semble avoir un renouveau sans fin en nouvelles framboises dans notre jardin cette année.

On a aussi une famille de tourterelles tristes. Je viens d’apprendre qu’elles aimaient parfois aussi ces baies.

Des tourterelles tristes à l'abri de la chaleur torride de juillet, sous le prunier en train de mûrir.

Tout ceci se situe dans une partie de la ville en difficulté, où de nombreuses personnes sont confrontées aux diverses formes de dépendance et aux traumatismes qui en découlent. Bien que très haute, la rangée de framboises n'agit pas comme un mur mais comme un centre nourricier pour le jardin. Une affirmation végétales pleine d’épines, mais délicieuse.

Demander la permission à une plante ?

Vous vous êtes peut-être demandé, en voyant le principe de cette semaine : Comment demander la permission à une plante ?

Mais plus je lis et plus j'y réfléchis, plus je me rends compte qu'il ne s'agit pas seulement de « demander » verbalement.

Ce framboisier est-il fragile ou en pleine croissance? (pour les nôtres, je pencherais plutôt pour la seconde option). La réponse devrait être souvent claire au premier coup d'œil. Mais d'autres choses viennent après une observation attentive de l'environnement.

Cette famille de tourterelles a-t-elle tout ce dont elle a besoin ? Peut-elle tirer suffisamment de graines de son environnement ?

Je ferais personnellement savoir que le cerisier de Virginie voisin est plein de fruits, et qu'ils sont mûrs en même temps que leurs voisines les framboises. À mon avis, si les oiseaux ont besoin de baies, ils pourraient apprécier davantage les cerises plus juteuses. Mais qui suis-je pour le savoir ?

Des phares rouges dans un monde parfois grisâtre

Le cadeau offert par les arbustes à baies est grand. Autant les en remercier. Nous n'avons fait que planter quelques tiges nues dans le sol, et voilà les baies.

« Dans un jardin, la nourriture est le fruit d’un partenariat. Si je ne ramasse pas les pierres et n’arrache pas les mauvaises herbes, je ne remplis pas ma part du contrat. [...] Mais je ne peux pas plus créer une tomate ou broder un treillis dans des haricots que changer le plomb en or. C’est la responsabilité et le don des plantes. Animer l’inanimé. En voilà, un don. (Traduction libre) »
— - Robin Wall Kimmerer, Braiding Sweetgrass, p. 126

Alors que j'arrache quelques mauvaises herbes en écoutant le chapitre intitulé « Épiphanie dans les haricots » (Epiphany in the Beans), une dispute conjugale se fait entendre à l'arrière-plan, menaçant de dégénérer. Les gens autour de nous nous disent que ce ne sont pas nos affaires.

Un officier en patrouille dans ce même quartier arrive dans le coin et nous parle de la situation des sans-abri, une situation quasi-insoluble, où il mentionne qu'il est souvent trop tard pour faire quoi que ce soit.

Le triste monde de l'abus de drogues dures et de la violence qui en découle a probablement été créé par des années de négligence de la part des systèmes successifs, mais nous ne pouvons pas blâmer un seul facteur pour sa cause. Un peuple itinérant, surtout s'il est moins fortuné, a du mal à se fixer et à s'enraciner.

Le fait est que si une personne décidait de commencer à recoller les morceaux de sa vie, aurait-elle la chance d’avoir un environnement favorable pour réussir ? Un sans-abri m'a dit un jour : « On nous a jetés hors de la forêt, maintenant on nous jette hors de la ville ». Et si nous leur donnions un endroit où se sentir en sécurité ? De se sentir chez eux ?

Les baies vont faner, comme le font chaque année toutes les plantes sauvages. Mais les gens vont continuer à vivre tout au long de l'hiver, s'ils ont de la chance.

J'aime le printemps pour son renouveau et son espoir, mais lorsque l'été approche, j'ai moi-même peine à supporter la chaleur torride. Imaginez que vous soyez obligé de rester dehors, avec la pluie battante et tout ça. L'automne, c'est bien quand l'air est frais, mais les pensées qui me viennent à l'esprit sont aussi assez tièdes. Rien que de penser à tous ceux qui doivent trouver un abri.

En attendant, nous avons les baies pour nous rendre heureux. On ne peut pas nier ça. Une demande spéciale à la rangée de framboises : continuez à être vous-mêmes, et à nous donner un petit goût de rouge dans la chaleur de l'été.

Passez une bonne semaine et n'oubliez pas de demander avant de prendre ! Lorsque vous regardez des plantes pendant la cueillette, vous arrive-t-il souvent de prendre un non comme réponse ?

Samuel LeGresley

Samuel est communicateur, motion designer depuis un jeune âge et activiste à ses heures. Il a grandi dans la Forêt acadienne en territoire non-cédé Mi’kmaq. Il a commencé à découvrir et identifier les plantes qui y poussent il y a quelques années. Il aime la musique, les livres et, bien sûr, les longues marches en forêt.

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