Multiplication éthique des plantes indigènes: l’avantage génétique des semences

Il est difficile de généraliser quand vient le temps de parler de choses vivantes en général. C’est certainement vrai pour les plantes indigènes. La route pour réaliser notre rêve de convertir notre cour en paradis pour la faune est souvent remplie de défis, quand vient le temps de se procurer les plantes qu’on veut. Ne trouvant que peu ou pas d’espèces dans une pépinière, vous avez peut-être essayé, à succès mitigé, de commander et multiplier des graines d’espèces spécifiques. C’est aussi la saison de collecte des semences pour plusieurs espèces. Tellement de choses peuvent aller mal, mais il ne faut pas perdre espoir! Le secret, c’est d’expérimenter de façon éthique.

Démêlons tout ça en parlant du pourquoi et du comment de la multiplication des semences de plantes indigènes dans une série de deux articles. Tout ça pour ensuite en démontrer les bienfaits et les méthodes pour aider à assurer le succès de notre opération multiplication.

Ce premier article, d’une série de trois, est écrit en partenariat avec l’Alliance du bassin versant Petitcodiac, qui mène un projet sur la disponibilité des semences indigènes près du Grand Moncton au Nouveau-Brunswick.

Le pourquoi des semences comme meilleur moyen d’assurer une diversité génétique

Il est facile de penser que vu que nos plantes indigènes sont « partout », elles sont faciles à propager! Mais malheureusement, ce n’est pas toute la réalité.

Ne se le cachons pas, les plantes indigènes sont devenues à la mode au jardin. Tellement, qu’il existe un manque de stock en semences de ces plantes partout en Amérique du Nord! C’était aux manchettes plus tôt en 2023, et la demande n’a pas cessé d’augmenter avec des engagements comme la plantation de 2 milliards d’arbres au Canada et 1 trillion (billion) d’arbres partout au monde par des organismes internationaux. C’est vrai aussi pour nos plantes herbacées et arbustes, pour qui la demande dans le domaine de l’horticulture s’est accrue grandement dans les dernières années.

Lorsqu’on apprend à reconnaitre nos plantes indigènes, on réalise qu’elles ont été remplacées dans plusieurs endroits par des plantes envahissantes et des arbres de plus petite taille. Imaginez la forêt Wabanaki-acadienne avant l’arrivée des colons, à quel point c’était rempli de belles plantes d’ici!

Sumac vinaigrier - “Staghorn Sumac” - Rhus typhina

Les graines semblent prêtes pour le sumac, cet arbuste aux allures exotique de la même famille que le cajou, les mangues et les pistaches.

Avec la fonte des glaciers d’il y a dix mille ans, des espèces ont migré au nord et se sont adaptées à ici. Grâce à un avantage génétique créé par la survie des plus fortes pousses, sur des millénaires, on en est venu avec un mélange génétique unique pour chaque espèce, adapté à chaque région.

Ce mélange particulier se nomme l’écotype, et se trouve même sous le niveau de l’espèce.

Cela peut probablement se traduire très pratiquement par des verges d’or (Solidago / “Goldenrod) de la même espèce qui nécessiteraient moins ou plus de stratification (traitement froid, chaud et / ou humide) selon la région d’où ils viennent. Mais peu de recherches ont été faites à ce sujet.

Cet avantage particulier est exactement ce que l’on doit préserver pour le futur, qui est, comme on le sait, incertain. Aidons à le rendre plus certain en récoltant les semences écotypiques de la bonne façon, si on décide vraiment de se lancer là-dedans!

Les semences permettent un type de multiplication de plantes sexuée.

Suivez ce lien de l’Université du Maine (en anglais) si vous voulez connaître les méthodes de multiplication à la fois sexuées et asexuées, comme le bouturage et le marcottage.

Le comment de la collecte éthique comme méthode durable de multiplication : L’exemple d’une verge d’or

Bon, avant de commencer de parler de collecte éthique, voici un avertissement:

Ne faites jamais la collecte de semences indigènes si vous n’avez pas l’accord du ou de la propriétaire. Cela constitue du vol. Qui sait, peut-être que la personne voulait récolter ces mêmes graines que vous pensez leur piquer!

Maintenant, il faut dire que tout dépend de l’espèce. Si elle est rare, je vous dirais d’essayer des espèces plus communes.

Deuxièmement, pour la collecte sauvage, si vous en avez la permission, il est judicieux de ne pas les utiliser pour la vente commerciale.

Il est habituellement moins taxant sur l’écosystème, si la plante le permet, de créer des sites d’augmentation de semences. Votre jardin pourrait en être un! Et le Native Plant Trust (le réseau de plantes indigènes du Nord-Est des États-Unis) a les banques de semences vivantes comme technique principale d’augmentation (site en anglais).

Compte tenu tout cela, retournons à notre collecte dans la nature où vous en avez la permission.

Choisissons les Verges d’or, qui sont maintenant en fleur (fin de l’été). Il faut d’abord les identifier. Selon moi, la plus facile à identifier est la Verge d’or toujours verte. Prenons-la comme exemple.

Verge d’or toujours verte (Solidago sempervirens / “Seaside Goldenrod”)

Cette verge d’or est commune sur le bord de la côte et près des endroits affectés par l’air salin. Elle est aussi tolérante au sel par rapport aux autres du même genre, ainsi que plus docile dans le jardin.

La verge d’or est le deuxième genre de plante qui nourrit le plus d’espèces d’abeilles indigènes, après le genre des tournesols (National Wildlife Federation). Voici des informations, en anglais, sur son usage horticole.

Il faut d’abord être certain de l’identification. Je recommanderais, pour commencer, une application téléphonique nommée Seek, ainsi qu’un livre de botanique pour confirmer.

Ensuite, il faut attendre à ce que la plante devienne prête à récolter. Cela peut bien prendre quelques mois entre le temps que vous l’avez repéré et le temps de maturation. Il faut que les graines soient prêtes à partir de la plante. Chez les Asteracées (famille des asters et des verges d’or), cela prend la forme d’akènes, des porte-graines qui peuvent comporter des centaines voire des milliers de graines. Des méthodes utilisées pour d’autres plantes, comme des tests de coupe (voir cet article en anglais pour plus de détails sur les tests de germination) sont beaucoup plus difficiles à performer ici.

La récompense : de belles plantes et de nouveaux amis volatiles!

Le Projet Amélanchier et l’Alliance du bassin versant Petitcodiac s’engagent à vous démontrer qu’il est possible de faire votre part pour aider la nature avec nos plantes indigènes.


Samuel LeGresley

Samuel est communicateur, motion designer depuis un jeune âge et activiste à ses heures. Il a grandi dans la Forêt acadienne en territoire non-cédé Mi’kmaq. Il a commencé à découvrir et identifier les plantes qui y poussent il y a quelques années. Il aime la musique, les livres et, bien sûr, les longues marches en forêt.

https://samlegresley.com
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